Usage des fongicides dans les bassins de production de pommes d’Occitanie - Agreste Études n°2 - Mai 2023
Résultats des enquêtes pratiques culturales
Usage des fongicides dans les bassins de production de pommes d’Occitanie
Les traitements fongicides tant au niveau des surfaces traitées que des doses de fongicides utilisées constituent le premier traitement phytosanitaire pour protéger la production de pommes. Cependant, compte tenu du climat et de la pression parasitaire des parcelles, les pratiques de protection sont différentes dans les deux principaux bassins de production de pommes d’Occitanie.
- Le verger de pommier régional et les traitements phytosanitaires
- Caractéristiques du verger de pommier
- Fongicides : premier traitement au niveau des surfaces et des doses
- IMPORTANCE DES DOSES HOMOLOGUÉES FONGICIDES AU SEIN DES VERGERS OCCITANS
- Les principales maladies en pomme
- Problématique oïdium
- ALÉAS D’EXPOSITION SELON LA DANGEROSITÉ DES SUBSTANCES, LA DOSE APPLIQUÉE ET LE NOMBRE DE PASSAGE
- Les exploitations enquêtées
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Le verger de pommier régional et les traitements phytosanitaires
Avec un peu plus de 9 400 ha (RA 2020) de verger de pommier, l’Occitanie représente 22 % des superficies nationales de cette culture devant la région Provence Alpes Côtes d’Azur (21 %) et la Nouvelle Aquitaine (17 %). Le verger de pommier régional se répartit principalement entre quatre départements : Tarn et Tarn-et-Garonne concentre 70 % de la superficie régionale et le Gard et l’Hérault 21 %. Dans cette étude il sera fait référence principalement à ces 2 zones de production qui concentrent plus de 80 % des superficies régionales et des parcelles enquêtées en 2018 (76 % des parcelles de l’échantillon). La production de fruits frais doit répondre aux différentes attentes des consommateurs et des circuits de distribution en termes de qualité gustative et d’aspect visuel, ainsi que d’état sanitaire pour pouvoir se conserver correctement dans le circuit de distribution. Ce niveau d’exigence élevé tant en qualité qu’en quantité est à mettre en relation avec le niveau de protection sanitaire du verger. La comparaison des traitements selon les principaux bassins de production de pommes permet de mettre en évidence des pratiques assez différentes en lien avec le climat, la pression sanitaire qui s’exerce sur le verger, la structure du verger et les stratégies de lutte contre les principaux bio agresseurs.
Caractéristiques du verger de pommier
Pour l’ensemble de la publication il sera fait référence pour la région Occitanie à la zone ouest (Tarn - Tarn-et-Garonne) et la zone est (Gard-Hérault).
Des vergers à densité moyenne
Plus de 50 % de la superficie du verger est caractérisé par une densité d’arbres par ha comprise entre 1500 et 2500. Pour la zone est, le verger est à 49 % avec une densité inférieure à 1 500 arbres contre 21 % pour la zone ouest. Les vergers occitans sont proportionnellement moins denses en arbres que les vergers de pommiers du Centre Val de Loire et des Pays de la Loire (plus du 1/3 avec plus de 2 500 arbres par ha).
Composition variétale des parcelles enquêtées
Les variétés enquêtées sont sensiblement différentes selon les 2 zones d’Occitanie. Plus de la moitié de la superficie (superficie extrapolée des parcelles enquêtées) avec Pink lady et Gala coté est et avec Gala, Golden et Fuji côté ouest.
Des exploitations engagées en protection fruitière intégrée (PFI) et en agriculture biologique (AB)
Un peu plus de 40 % des exploitations sont engagées dans une démarche de production fruitière intégrée. Les exploitations en AB sont faiblement représentées (moins de 10 %). Pour la zone est, près de 20 % des parcelles de l’échantillon sont en AB alors que côté ouest, cela concerne 16 % des parcelles.
Cahiers des charges phytosanitaires
Une partie des parcelles enquêtées sont engagées dans des cahiers de charges de production avec des engagements relatifs à l’usage des phytosanitaires (cahiers des charges ne correspondant pas à ceux des mesures agro-environnementales de réduction, voir rubrique définitions). Dans les 2 zones, la surface extrapolée correspondant à ces engagements est un peu supérieure à 40 % en cohérence avec les exploitations engagées en PFI.
Des aléas de production en 2018
La campagne 2018 est marquée en Tarn et Tarn et Garonne par plus d’aléas climatiques. 11 % de la superficie est affecté par un aléa contre 7 % pour la zone est. Une forte intensité orageuse est intervenue en 2018 dans la zone ouest avec des parcelles grêlées.
Rendements des vergers
Le rendement observé en 2018 pour les parcelles sans aléa est croissant avec la densité du verger. Le rendement est multiplié par 2 entre les parcelles les moins denses et les plus denses de la zone est. Côté ouest, l’accroissement est moindre (plus 7 % en moyenne).
Fongicides : premier traitement au niveau des surfaces et des doses
La superficie du verger est à 100 % traitée avec des fongicides et 80 % de la superficie est traitée avec les 3 types de traitements : herbicides, fongicides et insecticides. Un hectare sur cinq ne reçoit pas d’herbicides.
Au moins un traitement fongicide pour l’ensemble du verger
La proportion des surfaces traitées est relativement homogène selon les bassins de production. Toutefois, la région Provence-Alpes-Côte d’Azur (PACA) se différencie de l’Occitanie et de l’Aquitaine par plus de 27 % du verger sans herbicide et 20 % avec des traitements fongicides, insecticides et autres.
Comparaison des doses homologuées appliquées
La composition de l’IFT (indicateur de fréquence de traitement) total par bassins de production traduit beaucoup plus de diversité dans les pratiques de protection du verger.
En Occitanie 2/3 des doses homologuées pour les fongicides
La composition de l’IFT (indicateur de fréquence de traitement) total par bassin de production traduit beaucoup plus de diversité dans les pratiques de protection du verger. L’IFT total varie de 25 (Languedoc-Roussillon) à 38 (Limousin). Dans tous les bassins, les traitements fongicides représentent plus de 60 % des doses homologuées excepté en Languedoc–Roussillon (55 %). Cette part atteint 71 % dans le Limousin et 67 % en Midi-Pyrénées. La part des fongicides reste assez constante (55 % des doses homologuées) entre le bassin ouest (Tarn et Tarn-et –Garonne) et le bassin est (Gard et Hérault) avec cependant un nombre total de doses de pesticides inférieur de 10 doses dans l’Est. Un usage de doses homologuées insecticides plus important est observé en PACA et en LR. La part des traitements de type biocontrôle est variable de 16 % en Aquitaine à 24 % en Languedoc-Roussillon. En Midi-Pyrénées, comme en Aquitaine, l’IFT fongicide est prépondérant : 19 doses homologuées par ha pour un total compris entre 32 et 35. Pour les parcelles non AB, l’IFT total est de 39 pour l’Ouest et de 27 pour l’est. L’IFT en bio est très variable et n’est pas exploitable pour des analyses comparatives avec les parcelles non bio.
IFT et climat
L’influence atlantique se traduit très nettement par une pression plus forte des maladies fongiques et donc des traitements plus importants.
IFT et rendement
Le rendement est le résultat d’une bonne couverture phytosanitaire. Les parcelles à haut rendement sont aussi celles qui ont les plus hauts niveaux de protection en particulier en matière de lutte fongique. L’IFT fongicides est régulièrement croissant avec le rendement récolté dans la zone Est. En revanche, à l’Ouest, les surfaces se partagent en deux groupes selon leur niveau de rendement et d’IFT. Celles à rendement plus faible avec un IFT compris entre 20 et 25 et les parcelles à rendement plus élevé avec un IFT entre 25 et 30.
Effet de la pression parasitaire
La pression parasitaire peut être appréciée à la fois par le nombre de passages de fongicides et l’IFT fongicides. La répartition des parcelles selon ces 2 indicateurs illustre le niveau de pression des maladies fongiques assez différent entre les 2 principales zones de production d’Occitanie. En moyenne dans les 2 zones, ce sont 1,5 produits fongicides qui sont utilisés à chaque passage.
Une dispersion de l’IFT selon les zones et modes de production
Le nombre de doses homologuées par ha est assez dispersé (pratiques différentes selon la pression climatique et sanitaire). En Languedoc-Roussillon, l’IFT total est, pour 25 % des parcelles, inférieur à 21, et pour le quart, supérieur à 33. En MP, la dispersion est un peu moins grande entre le 1er quartile à 32 et le dernier à 42. La dispersion de l’IFT total est encore plus marquée pour les parcelles en AB (ensemble Occitanie) de 15 à 30 doses pour le 1er et dernier quartile. Ces écarts importants mettent en évidence une grande diversité des pratiques de lutte contre les bio-agresseurs. Ces écarts se retrouvent également pour l’usage des fongicides.
IMPORTANCE DES DOSES HOMOLOGUÉES FONGICIDES AU SEIN DES VERGERS OCCITANS
Ce sont près de 133 000 doses homologuées qui sont utilisées sur près de 6 400 ha de verger de pommiers (surface extrapolée à partir des parcelles enquêtées) soit 20 doses par ha. Le verger de pommiers, du fait de l’importance des surfaces (34 % des surfaces du verger occitan) et de l’usage plus fréquent de doses homologuées notamment fongicides (61 % des doses de fongicides), contribue fortement à l’usage de phytosanitaires dans les vergers occitans. Le verger de pêchers pour 24 % de la superficie régionale représente 22 % des doses homologuées de fongicides. Les autres espèces contribuent peu au total des doses homologuées épandues dans les vergers occitans.
Les principales maladies en pomme
Le verger de pommiers est affecté par 2 principales maladies causées par des champignons parasites : la tavelure et l’oïdium qui constituent 90 % des cibles des traitements fongiques réalisés. En zone Tarn-et-Garonne et Tarn, la pression tavelure et oïdium est supérieure à celle observée dans l’Hérault et le Gard. Au niveau de la médiane et pour l’indicateur du nombre de passage avec une cible tavelure, le différentiel entre les 2 zones de production est de 6 passages, pour l’oïdium l’écart est de 2. La représentation des parcelles selon le nombre de traitements avec une cible tavelure ou oïdium permet de bien discriminer les 2 zones de production d’Occitanie. La répartition de la surface selon le nombre de passages par cible traduit également cette différence entre les zones :
81 % des superficies de la zone Ouest ont plus de 12 passages avec la cible tavelure contre 33 % en zone méditerranéenne.
46 % des surfaces ont plus de 5 passages contre l’oïdium en zone ouest contre 31 % en zone est.
Problématique tavelure
Comparaison de l’appréciation de la pression tavelure et du nombre de passage avec cible tavelure
Pour la campagne enquêtée, une pression forte ou normale en zone Tarn et Tarn-et-Garonne semble correspondre à plus de 15 passages pour lutter contre la tavelure et concerne 58 % de la superficie du verger. Les suivis de pression sanitaire pour la campagne 2018 signalent une pression plutôt faible pour la tavelure pour la zone ouest compte tenu des références propres à cette zone et pour cette maladie (source bilan de campagne, bulletin de santé du végétal BSV). En zone est, une pression forte ou normale semble correspondre à moins de 15 passages ou moins de 10 passages pour la tavelure et pour 55 % de la superficie du verger. L’observation en cours de campagne dans la zone est signale plutôt une pression tavelure forte par rapport aux références de la zone (source bilan de campagne, bulletin de santé du végétal BSV).
Utilisation des variétés résistantes
Moins de 10 % du verger (enquêté) est implanté avec des variétés résistantes à la tavelure, 5 % pour la zone Gard et Hérault, 9 % pour le Tarn et Tarn et Garonne et 14 % pour les vergers extérieurs à ces 2 zones. Au total, il s’agit de 14 % et 18 % de la superficie qui est occupée respectivement par des variétés résistantes et peu sensibles. Le nombre de passage pour les variétés résistantes contre la tavelure est presque réduit de moitié (6 passages en moins en moyenne).
En Tarn et Tarn et Garonne et pour les productions AB, la superficie du verger est à 47 % plantée avec des variétés résistantes. En Hérault et Gard, cette part n’est que de 30 %, mais est de 50 % si on rajoute les variétés peu sensibles. Les variétés peu sensibles permettent également de réduire le nombre de passage contre la tavelure et l’IFT fongicides.
Maîtrise du développement primaire du champignon au printemps
La lutte contre la tavelure repose sur une stratégie d’élimination des risques de contamination au début du printemps. Fin juin, plus de 80 % du nombre de passage sur la parcelle est réalisé quelle que soit la zone. Les traitements interviennent sur plus de parcelles dans la zone Tarn-et-Garonne en début de campagne.
Le nombre de jours entre deux traitements contre la tavelure dépend de la pression (climat et niveau de contamination primaire), des produits de traitements utilisés (action par contact ou non) et de la fréquence des pluies. Il est en moyenne de 8 jours en Tarn-et-Garonne et Tarn contre 10 jours pour le Gard et l’Hérault.
Pas d’impact significatif des mesures prophylactiques
Les mesures prophylactiques notamment à l’automne pour éliminer toutes les sources de conservation de l’inoculum (responsable du développement primaire) sont assez répandues et sont pratiquées sur près de 75 % de la superficie. L’effet sur le nombre de passage et l’IFT fongicide n’est pas observé au travers de l’enquête.
La pratique d’un apport d’urée à l’automne pour réduire l’inoculum est peu répandue, 30 % du verger pour Gard et Hérault et 22 % en Tarn et Tarn-et-Garonne.
L’irrigation sur frondaison peut être un facteur de dissémination de l’inoculum par les gouttes d’eau. La comparaison des parcelles avec et sans irrigation sur frondaison montre une différence peu significative. Pour la zone est, un nombre de passages ciblés tavelure est légèrement supérieur (2 à 3 passages en plus en moyenne) par rapport aux parcelles où sont utilisées d’autres modes d’irrigation du verger. Certaines expérimentations signalent également l’usage de l’irrigation sur frondaison pour épuiser le stock d’inoculum.
Principaux produits et substances actives utilisés
80 % de la surface est traitée avec en moyenne 15 à 17 produits.
Les principales substances actives utilisées 3 molécules principales sont utilisées pour lutter contre la tavelure : le dithianon, le mancozèbe et le captane respectivement pour 25 %, 12 % et 9 % des passages. La substance active (SA) phosphonate de potassium fait l’objet de 10 % des usages et se trouve souvent associée au dithianon. 3 SA largement utilisées sont classées cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques (CMR) : mancozèbe, captane et fluxapyroxad.
Problématique oïdium
Comparaison de l’appréciation de la pression oïdium et du nombre de passage avec cette cible
Pour la campagne enquêtée, une pression forte ou normale se traduit dans les 2 zones par un nombre de passages compris entre 3 et 5. Dans les 2 zones, moins de 20 % de la superficie est classée en pression forte (perception de l’arboriculteur). Les observations en cours de campagne situent la pression oïdium normale pour la zone ouest et plutôt forte pour la zone est (selon les références des différentes zones, source bilan de campagne BSV).
Stratégie préventive
Des interventions précoces sont réalisées (dès le stade bouton vert) pour prévenir le développement de la maladie. Au 1er juin, 80 % des passages sont intervenus. Des traitements sont appliqués en moyenne tous les 10 jours dans les 2 zones de production. Les passages sont plus précoces et interviennent plus rapidement sur un plus grand nombre de parcelles en Tarn et Tarn-et-Garonne.
Taille en vert et nombre de passages pour lutter contre l’oïdium
La pratique de la taille en vert est peu répandue dans le verger de pommiers. Moins de 30 % de la superficie a eu une taille en vert au cours de la campagne. La taille en vert peut être utilisée pour éliminer les pousses contaminées par l’oïdium et réduire la dissémination des spores. La réduction du nombre de passages ciblés oïdium n’est toutefois pas observée pour les parcelles bénéficiant d’une taille en vert.
Principaux produits et substances actives utilisés
80 % de la surface est traitée avec en moyenne 13 produits.
Les principales substances actives utilisées
Le soufre est la principale substance active utilisée pour lutter contre l’oïdium dans près de 2/3 des passages ciblés.
Raisonnement des interventions et IFT fongicides
Les arboriculteurs peuvent recourir à des outils d’aide à la décision (OAD) notamment pour programmer les interventions contre la tavelure, et au bulletin de santé du végétal (BSV) qui permet de suivre la pression biologique des maladies dans les territoires arboricoles.
L’IFT fongicides se situe au-dessus de 23 pour les parcelles sans utilisation d’outil de raisonnement et avec des niveaux de rendement inférieur à 40 tonnes/ha. Pour les parcelles à plus haut rendement, le recours aux outils de raisonnement est systématique et l’IFT fongicides un peu au-dessus de 24.
ALÉAS D’EXPOSITION SELON LA DANGEROSITÉ DES SUBSTANCES, LA DOSE APPLIQUÉE ET LE NOMBRE DE PASSAGE
Tavelure
Pour les 2 substances actives classées CMR l’usage est entre 3 et 4 passages à une dose entre 3,5 et 4 kg par ha.
Le dithianon classé SGH 07 est également utilisé en moyenne entre 3 et 5 passages pour une dose de 1,3 à 2,2 kg par ha.
Les exploitations enquêtées
Des exploitations spécialisées
Dans les exploitations enquêtées, la superficie en verger représente 50 % de leur SAU en Hérault et Gard et 42 % en Tarn et Tarn-et-Garonne. Ce sont des exploitations spécialisées avec un verger de pommiers majoritaire : 57 % de leur superficie en verger en Tarn et Tarn-et-Garonne et 75 % pour Gard et Hérault. Les productions fruitières secondaires correspondent à la pêche, l’abricot et la cerise pour la zone est et à la prune et la cerise pour la zone ouest. Le rendement observé se situe à un niveau largement en dessous de la moyenne pour les exploitations dont le verger de pommiers n’est pas majoritaire dans la sole.
Irrigation
La quasi-totalité du verger est irriguée, cependant les modes d’irrigation des parcelles enquêtées sont assez différents selon les 2 zones d’étude. L’aspersion est prédominante dans le Tarn et le Tarn-et-Garonne (67 % de la superficie). L’irrigation par goutte à goutte est pratiquée sur moins de 30 % de la superficie. Les modes d’irrigation sont plus diversifiés dans le Gard et l’Hérault : l’aspersion sur quasiment 1/3 et le goutte à goutte sur près de 40 % de la superficie.